lundi 27 décembre 2010

Cartographies numériques et Géographie scolaire

Cartographies numériques, néogéographie, cartographie 2.0., géoweb, les appellations se multiplient pour qualifier la "révolution" géomatique actuelle qui renouvelle les modes de production et de consommation de l'information géographique. Cette "révolution" est liée directement aux progrès permanents des nouvelles technologies : GPS, Internet, Web 2.0., SIG, globes virtuels... qui multiplient la production d'informations géographiques et envahissent le quotidien. Cette "révolution" permanente interpelle la Géographie scolaire, en offrant des possibilités nouvelles, en posant des questions sur la formation nécessaire à ces nouveaux usages numériques et sur la finalité de nombre de ces outils.
Cet article est conçu comme une introduction à ces nouveaux enjeux , basée sur quelques références glanées sur la toile et sur une indexation personnelle d'outils pouvant être pertinents pour l'enseignement de la Géographie.

Définitions et enjeux
Thierry Joliveau, qui enseigne la géographie, les concepts et méthodes géomatiques, l’analyse spatiale et les statistiques à l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne (France) répond à cette question dans un article de vulgarisation. Apparu en 2005 avec Google Maps, le Géoweb est "une organisation par l’espace de l’information sur Internet  à travers un géoréférencement direct ou indirect sur la surface terrestre". Google Maps, le pionnier, est conçu comme un service de services, c'est une API qu'investissent les développeurs informatiques. D'autres concurrents comme Bing Maps ou Yahoo Maps suivent. Le Géoweb volontaire et contributif se développe également sous l'effet de l'explosion du web 2.0. Désormais, on explore le web par le monde, grâce aux services cartographiques, et on explore le monde par le web, grâce aux applications mobiles ( pensez au développement dela réalité augmentée). On se dirige également vers une information instantanée et ubiquitaire.
Loïc Haÿ distinguait il y a trois ans trois types de cartographies numériques :
  • le modèle de la cartographie SIG (système d'informations géographiques où l'information est produite et consultable par des experts, où la carte est un outil d'aide à la planification et à la décision
  • le modèle de la cartographie 1.0 où la carte est produite par des experts et consultable par tous : c'est un outil d'information et de communication
  • le modèle de la cartographie 2.0.où l'information géographique est produite et consultable par tous et la carte un outil d'interaction et de participation
Son diaporama explique et donne un aperçu des services du Géoweb qui ont fleuri sur la toile.
Cartographie 2.0

Renaud Euvrard définit la Néogéographie comme un ensemble de techniques et d'outils web se différenciant des traditionnels SIG, et qui concerne des personnes utilisant et créant leurs propres cartes, tout en les combinant avec leurs propres données. C'est un néologisme, tout comme le Géoweb, qui pour l'auteur, associe le web et les informations géographiques. Le géoweb se forme grâce aux outils de la néogéographie.
La cartographie sur Internet - De la néogéographie au géoweb

Enfin, Jérémie Valentin présente les actions-clés de la néogéographie dans une série d'articles (A quoi sert la Néogéographie ?) : Annoter, Commenter, Géoreférencer, Construire, Réagir, Contester, Cartographier, Représenter, Diffuser. Il s'interroge également sur le sens du terme de Néogéographie qui se rapprocherait d'une image de géographie amateur qui lui colle à  la peau, mais qui en même temps "ne reflète pas ou très peu les problématiques liées à la multiplication des géo-données ou encore au nomadisme des outils qui caractérise cet univers."


Actuellement, les débats ne semblent pas clos sur l'usage de termes tentant de conceptualiser une formidable explosion de la production et de la consommation de l'information géographique. Les évolutions rapides des outils et des systèmes ne simplifient pas ce travail de conceptualisation, les frontières entre SIG, wepmapping et cartographie collaborative étant de plus en plus floues.


Quels usages scolaires ?
 Les nouveaux programmes de Géographie du secondaire insistent tous sur le nécessaire usage de la cartographie numérique, des SIG et globes virtuels. En juin 2007, le café pédagogique a publié un dossier intitulé "géomatique : la déferlante Google Earth" qui montre bien les changements pédagogiques introduits par le populaire Globe Virtuel. 
Reste à savoir si utiliser les outils de géomatique, c'est faire de Géographie ?
Sylvain Genevoix rappelle quelques précautions d'usages face à ce nouveau rapport à l'image cartographique et à ce monde à portée de clics :

  • "Peu de réflexion sur les pratiques cartographiques avec l'ordinateur : quelle place pour  la discrétisation, les seuillages, la construction de la carte ? Comment réduire le décalage avec le croquis de synthèse papier du baccalauréat désormais ritualisé ?
  • Mise en garde contre les "effets de réel" : la carte de visualisation qui peut accentuer le cours magistral en vidéoprojection, ou  l'immersion dans la navigation 3D (du type simulation de vol) sans conduire aux apprentissages visés par la cartographie et  la géographie. 
  • Un encouragement à utiliser les SIG pour faire de la géographie : outil d'analyse spatiale et d'investigation avec de vraies requêtes spatiales attributaires, même si les pré-requêtes du Géoportail ou d'Edugéo sont déjà une entrée."
D'autant plus que le Géoweb est soumis à critiques :
  • Amateurisme : n'importe quel internaute peut produire une carte à partir de données personnelles
  • Manipulation : que la carte émane de particulier ou de sociétés privées
  • Intrusion et problème de respect de la vie privée : les nombreux services web 2.0. collectent et partagent les informations personnelles des utilisateurs, parfois à leur insu. En France, une loi oblige à demander l'autorisation pour utiliser ces informations aux internautes. Mais la loi est parfois dérisoire face à des sociétés basées à l'étranger
  • Informations partielles : de nombreux territoires sont délaissés ou en marge de cette production d'informations géographiques. Les villes des pays développés sont sur-représentées. Il suffit de penser au zonages de définition différents dans Google Earth
  • Question sanitaire : des débats existent aussi sur les usages intensifs d'appareils transmetteurs d'ondes (téléphones portables, GPS, antennes diverses, wifi...)
  • confidentialité et diffusion de données privées et publiques : au profit de qui, avec quelles limites ? A signaler que de plus en plus d'Etats, de collectivités et d'institutions partagent leur données géolocalisées, comme l'INSEE par exemple ou encore la Banque Mondiale.
  • le modèle économique du Géoweb interpelle. Elle collecte les données privées, peut les revendre, certains services disparaissent...
Quand Facebook utilise les données géo-localisées !




Pour parvenir à ce résultat, Paul Butler, ingénieur statisticien chez Facebook, a analysé un échantillon de 10 millions de « paires d’amis » : 
  • les infos sur leur localisation géographique
  • l’intensité des connexions obtenues : plus le nombre de connexions entre deux points est important, plus le trait qui les matérialise tire vers le blanc
Source : Décibelles


Pourquoi utiliser le Géoweb dans la Géographie scolaire ?
J'emprunterais à Thierry Joliveau, de nouveau, les deux premiers arguments :
  • "Analyser les données du geoweb nécessite une culture géographique solide." Elle concerne l'Etat et les collectivités, les sociétés privées, les scientifiques aussi. Elle pose la question de l'accès et de la gestion de masses de données fabuleuses. La question de la formation à cette masse d'informations est un premier défi à relever avec les élèves. C'est un enjeu à la fois lié à la Géographie enseignée et à la citoyenneté.
  • "Le GéoWeb est censé servir au public en ordonnant géographiquement l’Internet et en facilitant l’accès à l’information quand et où on en a besoin." Les usages du Géoweb se multiplient, inutile de lutter contre, mieux vaut former aux usages et à la culture numérique.
  • Si les SIG restent un outil à plébisciter, le Géoweb propose souvent des services gratuits (ou partiellement) fiables et performants, comme le Géoportail, Géoclip. Ainsi, le Géoweb est de plus en plus investi par de nombreuses institutions. D'autre part, le GéoWeb n'est pas uniquement sujet à la marchandisation des données. Des projets comme OpenStreetMap propose de créer une carte open source de la planète, de manière communautaire et collaborative.
  • Ces outils permettent de plus en plus d'établir des discrétisations de données ou des requêtes attributaires qui restaient jusqu'à peu l'apanage unique des SIG. Ces opérations sont essentielles dans la démarche de l'analyse et de la construction cartographique.
  • en conséquence, dans nos classes, le professeur dispose d'un panel d'outils et de services géographiques plus ou moins simples, interactifs, ne nécessitant pas d'installation sur des portes en réseau. Bref, tout un ensemble de simplicités fonctionnelles non négligeables.
Pour conclure, je vous propose ma sélection d'outils de cartographie interactive, sur un bureau symbaloo qui sert en stage de formation dans l'académie de Rouen. 



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