jeudi 5 mai 2011

Les compétences sont-elles communicantes ?

Suite aux réunions avec Mr Raulin, le travail par compétences se prépare progressivement dans notre établissement.
Aujourd’hui, une collègue d’un collège voisin est venue nous présenter l'expérience d'une classe de 6e sans notes, à l’aide d’un diaporama conçu en début d’année à destination des familles.
Les motivations des collègues sont de réduire l’échec en détectant les points à remédier, d’éviter les discriminations et le découragement liés aux notes et par la mise en oeuvre de repères d’évaluation communs (les points Lomer). Une équipe pédagogique motivée a travaillé cet été pour établir la liste des points à évaluer (venant du socle et des programmes), de nouveaux modes d’évaluation, la remédiation. Un travail colossal dont la lourdeur a empêché la pleine réalisation et qui mènera à des adaptations l’an prochain. Par manque de temps, l'exposé s'est concentré sur les difficultés et les pièges à éviter mais nous attendons d'en savoir plus sur les réussites et les changements induits par cette nouvelle pratique.
Parmi les dispositifs créés dans ce collège, une fleur, dont chaque pétale indique le niveau de performance dans une discipline à l’issue d’un trimestre. Ce qui rappelle le diagramme circulaire de Pronote. En effet, grâce à une feuille de calcul excel, les points Lomer, pour chaque compétence, sont transformés en pourcentage de réussite. Un élève qui obtient ainsi 50% en mathématiques voit son pétale mathématiques colorié de moitié.
La nécessité de metttre un chiffre sur une performance scolaire est justifiée par la volonté de donner des repères clairs aux élèves, ainsi qu’aux familles qui apparemment étaient en attente. Dans les évolutions prévues d’ailleurs par les collègues figure le retour aux notes et aux moyennes, tout en conservant les compétences, soit un double système.
Cet exemple illustre bien la difficulté à passer d’un système de notes convenu et institutionnalisé à un système basé uniquement sur l’évaluation par compétence. Cette difficulté émane tant de la demande sociale que de celle des professeurs. Malgré les bonnes volontés affichées, les effets pervers de la notation ont pesé peu face à l’habitus scolaire.
Cet exemple met en exergue une question fondamentale dans la mise en oeuvre d’un tel projet : la communication des résultats aux familles et aux élèves.

Nous connaissons l’école primaire et les pages de compétences référencées par items avec les colonnes acquis/non acquis (livret scolaire) qui se superposent au palier 2 du socle commun. Au collège voisin, ce sont près de dix pages d’évaluation par compétences disciplinaires et transversales qui sont rendues aux familles. En fin de 3e, le livret par compétences n’échappe pas au même constat. Le problème de ces listes est qu’elles ne font pas émerger l’essentiel, en mettant sur un même plan des compétences (et pseudo-compétences) disparates dont on sait parfaitement qu’elles n’ont pas la même valeur scolaire.

Aussi peut-on s ‘interroger sur la façon de concevoir le travail par compétences et de communiquer les résultats scolaires par compétences ? Mission impossible ?


Voici une liste de conditions que nous pourrions suivre en cas de mise en oeuvre du travail par compétences en classe de 6e :
  • éviter la classe expérimentale. Comment réagiriez-vous si votre enfant était dans la seule classe évaluée différemment à l’entrée au collège ?
  • supprimer toute référence chiffrée. Celle-ci réduit toute analyse complexe à une question de niveau face à une norme prescrite.
  • éviter les longues listes et d’items et en conséquence hiérarchiser.
  • lister les objectifs à atteindre par un élève à la fin d’un niveau de classe.
  • formuler ces objectifs en compétences transversales larges, et placez le curseur sur un niveau d’exigence commun et minimum.
  • formuler des compétences restreintes en nombre par discipline, là aussi de manière assez large, ce qui n’empêche pas dans la pratique de la discipline les déclinaisons, (comme les items déclinent les domaines des compétences du socle...) ni les évolutions (changement de curseur, travail de nouvelles compétences).
Ainsi un bulletin peut s’abstenir de communiquer toutes les déclinaisons évaluées ou mises en oeuvre dans le trimestre, mais doit se concentrer sur les objectifs transversaux et disciplinaires. Ce mode serait ainsi plus riche, plus juste et plus complexe et moins réducteur que des moyennes, tout en se concentrant sur les progrès réalisés.

Un bulletin trimestriel pourrait ainsi contenir :

  • un bilan commenté des compétences transversales
  • un bilan par matières, sans mention d’un niveau général, mais pointant les progrès et les points à améliorer.
  • Un rappel des évaluations interdisciplinaires par tâche complexe est aussi envisageable si elle n’alourdit pas inutilement le bulletin.
Pour conclure, il semble essentiel de mettre en place un langage commun entre les familles, les élèves et l’institution, afin d’accompagner au mieux la scolarité des élèves. Pour les enseignants, ce langage commun amène aussi à considérer la place de sa discipline (dans les contenus, les modes d’enseignement) au sein de l’ensemble du curriculum et de mettre en place un enseignement qui intègre des objectifs éducatifs partagés et donc un regard partagé sur tous les apprentissages, ce qui n'est pas la moindre des tâches...

1 commentaire:

Anthony Lozac'h a dit…

Pour prolonger l'article, notre collègue Laurent Fillion relate sont expérience sur le sujet :
http://laurentfillion.wordpress.com/2011/02/23/evaluation-par-competences-de-la-necessite-dinformer-les-parents/